Page:Bainville Les conséquences politiques de la paix 1920.djvu/68

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
60
CONSÉQUENCES POLITIQUES DE LA PAIX

çais sont créanciers d’une masse de 60 millions d’Allemands, et pour une créance recouvrable en trente ou quarante années.

On se demande comment, dans ces conditions, licence n’a pas été laissée à l’Allemagne d’an­nexer l’Autriche. Après tout, l’Autriche, pro­vince allemande, représentée en 1848 au Parle­ment de Francfort, n’avait été tenue à l’écart de la grande Allemagne, de la mère commune des Germains, que par des causes historiques et dynastiques. L’État des Habsbourg ayant cessé d’exister, il n’y avait que des raisons politiques qui pussent déterminer les Alliés à interdire aux Allemands d’Autriche de se réunir aux autres Allemands. Ces raisons étaient si fortes qu’elles ont triomphé contre le principe des nationalités et le droit des peuples. Il eût été absurde et scandaleux de permettre à l’Alle­magne vaincue de jouer à qui perd gagne et de retrouver plus de territoires et de population qu’elle n’en restituait. Encore ne sommes-nous pas bien sûrs que, sans la presse et l’opinion publique, qui, cette fois, grondèrent, la sépa­ration de l’Autriche eût été maintenue et que le gouvernement français n’y eût pas renoncé. Il y avait peu de certitude, peu de fixité chez nos négociateurs et leurs conseillers, parce qu’ils n’avaient ni vue d’ensemble ni doctrine. Un moment, ils songèrent même au jeu dangereux des « compensations ». Contre la rive gauche du Rhin abandonnée à notre influence, l’Alle­magne eût annexé l’Autriche. O naïfs diplo-