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LES TRAITÉS DE WESTPHALIE

cédents. Le cardinal, lui aussi, fit en sorte de ne recourir aux armes qu’après avoir épuisé les ressources de la diplomatie. Il laissa les Danois d’abord, puis les Suédois, se battre et fatiguer l’Empereur avant de faire couler le sang français. Ensuite, il prépara par la diplomatie le succès de l’intervention armée. À la Diète de Ratisbonne, où le travail de ses agents fit échec à l’Empereur, son plan fut conforme à la devise formulée sous Henri II, mais pratiquée bien avant le règne de ce prince : «  Tenir sous main les affaires d’Allemagne en aussi grande difficulté qu’il se pourra. »

À cette politique réglée sur celle du siècle précédent, Richelieu ajoutait un élément destiné à lui donner une ampleur nouvelle. L’attitude que l’entreprise révolutionnaire et séparatiste des huguenots de France l’avait obligé de prendre à l’égard du protestantisme imposait des tempéraments à notre alliance avec les protestants d’Allemagne. Le problème à résoudre était complexe. L’intérêt de la France était de s’unir à la ligue évangélique allemande et à Gustave-Adolphe, héros de la Réforme, contre l’Empereur. Mais il était impossible, en raison de la position prise par les réformés en France, de se livrer sans contre-partie au protestantisme européen. C’est la pensée que le confident et l’auxiliaire du cardinal, le célèbre Père Joseph, exprimait avec force lorsque, parlant de l’alliance avec les protestants allemands, il disait qu’il fallait « se servir de ces choses comme d’un remède dont le peu sert de contre-poison et dont le trop tue ». Née d’une double nécessité, créée par l’obligation d’accorder les intérêts du dedans avec ceux du dehors, la politique de Richelieu, loin d’être opprimée par la difficulté, en reçut un surcroît de vigueur. Tout en secourant la ligue protestante en Allemagne, le cardinal conçut l’idée de dissocier la cause de l’Empereur et la cause catholique. S’étant rendu compte que les princes catholiques tenaient à leur indépendance en face de l’Empire ni plus ni moins que les princes et les États protestants, il mit tout son effort à leur représenter que la Contre-Réformation, dont se