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rencontrait déjà en Italie. En 1863, la Pologne s’était insurgée contre la domination russe, et Napoléon III essaya d’intervenir. Il n’y gagna que le ressentiment d’Alexandre II auquel Bismarck s’empressa de se joindre pour conserver les provinces polonaises de la Prusse et, en même temps, pour gagner le tsar à ses desseins sur l’Allemagne. Brusquement, l’année suivante, la question allemande fut posée par l’affaire du Schleswig-Holstein. Cette fois, Napoléon III refusa la proposition anglaise qui était d’intervenir en faveur du Danemark attaqué par la Prusse et l’Autriche. L’empereur objecta que, défenseur des nationalités en Italie, il ne pouvait pas prendre une autre attitude en Allemagne, les duchés étant revendiqués par la Confédération germanique. Le résultat ne fut pas seulement de livrer à l’Allemagne les Danois du Schleswig. Cette conquête fut pour Bismarck le point de départ de l’unité allemande, le prétexte du conflit qu’il lui fallait pour expulser l’Autriche de la Confédération. Ce plan était visible. Il ne pouvait échapper à ceux qui suivaient le cours des événements. Napoléon le favorisa. Toujours à la recherche d’un succès qui consoliderait son trône, il revint au système de l’époque révolutionnaire, celui des compensations. Il laissait le champ libre à la Prusse en Allemagne et, en échange, la France recevrait un agrandissement. À l’entrevue de Biarritz avec l’envoyé du roi Guillaume, en 1865, l’accord se fit sur cette base, mais sans engagement formel de la part des Prussiens. En même temps, pour compléter la chaîne, Bismarck s’alliait à Victor-Emmanuel et lui promettait la Vénétie au cas d’une guerre commune contre l’Autriche. Cette combinaison, dangereuse pour la France, puisqu’elle associait l’unité italienne à l’unité allemande, Napoléon III l’approuvait, parce qu’il espérait que Venise ferait oublier Rome aux Italiens. Quand il s’aperçut du danger, il était trop tard, parce qu’il ne pouvait plus s’opposer à l’expansion de la Prusse et soutenir l’Autriche qu’en reniant et en détruisant son œuvre d’Italie.

Ce n’était même pas tout. Lorsque la guerre éclata en 1866 entre la Prusse et l’Autriche, soutenue par les États de l’Allemagne du Sud, Napoléon III était empêtré dans une aventure d’Amérique. En 1864, ayant envoyé de concert avec l’Angleterre et l’Espagne, quelques navires et quelques troupes au