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Et en effet, le 14 février 1867, à l’ouverture de la session législative, il avait cité ces paroles du testament de Sainte-Hélène comme la maxime mère de toute sa politique : « Une de nos grandes pensées a été l’agglomération, la concentration des mêmes peuples géographiques qu’ont dissous, morcelés, la politique et les révolutions. »

Le vaincu de Sedan ne craignait même pas, dans cette brochure, de rappeler qu’après Sadowa encore il s’était réjoui devoir l’unité germanique en marche. Il rappelait qu’il avait observé dans la guerre de 1866 une neutralité qui reste inexplicable si l’on ne se souvient que Napoléon III était le champion du droit des peuples. Enfin il se faisait gloire d’avoir écrit la circulaire La Valette dont nous avons déjà parlé, et où il s’applaudissait des événements qui venaient, en quelques semaines, de transformer l’Allemagne, et de faire une redoutable puissance de ce qui était, la veille encore, division et anarchie.

La politique, ajoutait Napoléon III, doit s’élever au-dessus des préjugés étroits et mesquins d’un autre âge. L’empereur ne croit pas que la grandeur d’un pays dépende de l’affaiblissement des peuples qui l’entourent et ne voit de véritable équilibre que dans les vœux satisfaits des nations de l’Europe[1]. En cela, il obéit à des convictions anciennes et aux

  1. À cette théorie, en apparence généreuse, Proudhon objectait avec raison : Qui peut se flatter de jamais satisfaire ces vœux ? En posant le principe, vous rendez les nationalités insatiables. Toutes élèveront tour à tour leurs prétentions. Il n’y aura plus de tranquillité pour l’Europe, ni pour le monde. Et Proudhon prophétisait que le principe des nationalités, prétendu humanitaire, ferait couler des torrents de sang en Pologne et dans les Balkans ; (Voir sa brochure Si les traités de 1815 ont cessé d’exister, réponse au discours impérial d’Auxerre.)