Page:Bainville - Bismarck.djvu/199

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

C’est une rarissime brochure, publiée à Bruxelles à la fin de 1870 sous ce titre : Des relations de la France avec l’Allemagne sous Napoléon III. Elle est signée par le marquis de Gricourt, sénateur de l’Empire, après, avoir été un des premiers amis de Louis-Napoléon Bonaparte, un des complices de l’échauffourée de Strasbourg. Le fidèle Gricourt ne servit ici que de prête-nom, car il est établi que la brochure fut écrite par l’empereur lui-même. C’est une apologie et une défense de sa politique, et l’on y voit cette même persistance de l’illusion, ce même acharnement dans la chimère que nous venons de trouver dans les lettres à la comtesse de Mercy-Argenteau. Même naïveté, même inintelligence des faits, même surprise devant les événements, et même dépit de l’utopiste incorrigible devant la méchanceté des hommes, découverte pour la première fois.

Il y a, dans cette brochure, des aveux d’une simplicité prodigieuse, qui en font un acte d’accusation plutôt qu’un plaidoyer. C’est ainsi que Napoléon III explique sa neutralité dans cette guerre de Danemark par laquelle la Prusse annonça ses conquêtes et sa grandeur, et qui commença notre décadence en nous aliénant définitivement l’Angleterre, aux côtés de laquelle l’empereur avait refusé d’intervenir : « L’empereur, dit la brochure, après avoir proclamé très haut le principe des nationalités, pouvait-il tenir sur les bords de l’Elbe une autre conduite que celle qu’il avait suivie sur les bords de l’Adige ? Il était d’ailleurs bien loin de supposer que la guerre, dont le but avoué était de soustraire