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Ainsi Louis-Napoléon et son confident avaient recueilli comme un précieux héritage l’esprit révolutionnaire du testament de Sainte-Hélène. L’un et l’autre acceptaient et comprenaient l’idéal cosmopolite qui avait inspiré l’œuvre de Napoléon Ier comme celle de la Révolution. Cet idéal, les proclamations que Louis-Napoléon avait préparées pour l’affaire de Strasbourg l’expriment nettement déjà. Elles annoncent tout le programme du second Empire. Louis-Napoléon disait dans sa première « proclamation au peuple français », en imitant, non sans feu ni sans adresse, le style des bulletins de la Grande Armée :

Français, que le souvenir du grand homme qui fit tant pour la gloire et la prospérité de la patrie vous ranime ! Confiant dans la sainteté de ma cause, je me présente à vous le testament de l’empereur Napoléon d’une main, l’épée d’Austerlitz de l’autre. Lorsqu’à Rome le peuple vit les dépouilles ensanglantées de César, il renversa ses hypocrites oppresseurs. Français, Napoléon fut plus grand que César : il est l’emblème de la civilisation au dix-neuvième siècle.

Fidèle aux maximes de l’empereur, je ne connais d’intérêts que les vôtres, d’autre gloire que celle d’être utile à la France et à l’humanité

J’ai voué mon existence à l’accomplissement d’une grande mission. Du rocher de Sainte-Hélène, un regard ; du soleil mourant a passé sur mon âme ; je saurai garder ce feu sacré ; je saurai vaincre ou mourir pour la cause des peuples.

Et dans, sa proclamation à l’armée, il répétait encore :

Soldats, français, quels que soient vos antécédents, venez tous vous ranger sous le drapeau tricolore régénéré : il est