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datèrent pour la Prusse sa grandeur et sa prospérité.

Godefroy Cavaignac, en soutenant cette thèse, unissait étroitement ses sentiments de patriote et ses sentiments de républicain. Il était de cette école qui croit au caractère national de la Révolution et qui voit dans les idées de 1789 un des titres d’honneur de la France. Il était aussi de cette respectable et honnête fraction du parti républicain qui se préoccupe de ne jamais séparer les principes démocratiques et libéraux du patriotisme. Aussi, en écrivant son histoire de la Prusse selon ce système, avait-il dessein de montrer comment les idées de 1789 peuvent servir à rendre un pays plus fort et mieux armé pour ses revanches.

Godefroy Cavaignac se trompait évidemment et il a peut-être assez vécu pour voir, par le développement parallèle de la France et de la Prusse, en quoi péchait son système. L’influence de la Révolution et des idées révolutionnaires sur les destinées de la Prusse n’est pas niable. Mais elles n’ont pas agi comme le croyait M. Cavaignac. Ce qu’il prend, dans la réorganisation de la Prusse après Iéna, pour un retentissement de ce qui s’était fait quinze ans plus tôt en France, c’est tout simplement le passage de l’état féodal à l’unité monarchique : c’est la restauration de l’idée d’État, comme Louis Xlll et Louis XIV, las de l’anarchie féodale, l’avaient comprise. Stein et Hardenberg, les grands ministres prussiens, n’ont pas refondu la Prusse selon le système des hommes de la Constituante ni