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Marie entre chez elle :

— Ah ! Madame, souffle Mélanie, je suis bien contente de vous voir.

Puis elle ferme les yeux.

J’y vais à mon tour, très ému. C’est la première fois que j’entre dans sa chambre, qui est en somme une chambre de vierge. Elle sommeille, blanche, la bouche ouverte, l’air déjà morte. Elle tourne un peu la tête.

— Bonjour, Mélanie, vous allez bien ?

Je n’ai rien trouvé de mieux.

Je me heurte à Benooi :

— Eh bien, Monsieur, qu’en pensez-vous ?

— Oui… Benooi… oui.

Et je file.

— Benooi ?

— Mélanie ?

— Vous savez que les beaux draps blancs se trouvent dans la grande armoire.

Benooi va voir : il s’assure en même temps que le cierge qui a servi la dernière fois à l’agonie de son frère, est encore assez long.

— Tant que le docteur ne prescrit pas de poudre blanche, a dit Fons, il reste un peu d’espoir.

Et ce matin, le docteur, qui prépare lui-même ses ordonnances, rapporte dans une boîte, trois petits paquets gonflés d’une poudre blanche.

— Si elle a faim, dit le docteur, donnez-lui tout ce qu’elle désire.

Mélanie, qui a sans doute entendu, ne profite pas de la permission.

Les mots qu’elle soufflait ne tenaient plus ensemble. Elle ouvre les yeux en sursaut :

— Garçon, dit-elle, qu’on n’oublie pas de mener le Bourgmestre au taureau.