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ranger à nouveau, car je trouve décidément cette cuisine un peu longue. Je dis à Marie :

— Il y en a beaucoup.

— Beaucoup de quoi ?

— De crêpes, Marie.

— Bien sûr, dit Marie, je suis contente. Tiens, descends cette pile à la cave.

C’est la quatrième. Je triche un peu : je me permets un bout de crêpe, puis toute la crêpe, parce qu’elle est bonne. Cela prend dix minutes. Quand je remonte, je jette un coup d’œil dans la terrine : elle est toujours aussi pleine…

— Marie ?

— Quoi donc ?

— Tu en as encore bien pour une heure.

— Au moins, la pâte monte toujours.

— Ah !

Trois crêpes plus tard :

— Marie, ne trouves-tu pas ? Une autre fois, nous pourrions en faire un peu moins.

— Oh ! non, dit Marie ; des crêpes, ce n’est gai que s’il y en a beaucoup. Encore une…

— Marie, dis-je tout à coup, qu’en penses-tu : si j’allais bêcher un peu, au jardin ?

— Bêcher le soir. Mais non, regarde celle-ci, comme elle se gonfle.

Elle se gonfle en effet très fort, mais pas plus que les autres.

Celle-là placée, je vais jusqu’au bout de la cuisine, je reviens à Marie, je m’éloigne un peu plus et, doucement, sans en avoir l’air, — puisqu’elle s’amuse :

— Ça va, Marie, ça va ? me voilà dans mon coin de tous les soirs, avec un livre.

— Encore une, annonce Marie.

Puis : « Encore une… » Puis : « Encore une… »

Je réponds : « Oh ! oh ! » ou bien « Ah ! ah ! » puis plus rien, parce que le passage que je lis est un peu difficile à comprendre.

Je n’entends vraiment bien que lorsque Marie annonce :

— Attention, je commence la dernière.