Page:Baillon - Histoire d'une Marie, 2è édition, 1921.djvu/73

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Oui, comme ailleurs.

Elle vit le palais du roi, un beau palais, non à cause du roi, qui en ce temps était une reine, mais à cause des gardes : bottés jusqu’aux genoux, en culotte blanche, jaquette rouge, un grand panache sur le casque et à cheval.

— C’est beau Londres, où l’on voit de si beaux hommes.

Elle vit mieux : un cri de métal, toute la rue qui s’arrête, un tourbillon écarlate qui passe, avec des cuivres et des tuyaux.

— Tu as de la chance, tu as vu les pompiers.

Après ce fut tout ? Non, elle apprit le principal : deux rues.

Oxford street et Piccadily : la première qui importait parce qu’elle menait à la seconde. On pouvait se croire à Bruxelles, dans une de ces rues austères, autour du Parc. À gauche, vous voyiez ce Parc, à droite des maisons, de hautes fenêtres, de grandes portes, des pierres hargneuses, ce qu’il faut pour loger des riches :

— Les clubs.

Ayant dîné, les Anglais y entraient, rouges comme leurs quartiers de viande ; plus tard, ils en sortaient très blancs, ayant bu. Ils n’étaient pas soldats et portaient cependant l’uniforme : escarpins vernis, foulard de soie, manteau noir et, là-dessous, l’habit où l’on est tout à fait correct. Des gens riches et même quelque chose de plus : « Rupins », disait Vladimir, et, par-dessus le marché, Anglais, pas Belges, pas Français, pas Allemands : Anglais ; raides, méprisants, la figure en pierre, de la pierre qui serait un peu triste.