Page:Baillon - Histoire d'une Marie, 2è édition, 1921.djvu/56

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à préparer la demeure du dimanche. Celui-là, avant qu’il n’arrive, vous avez déjà interrogé la figure qu’il fera dans le ciel. Quelle chance ! Ce ciel est rempli de clartés et votre joie y ajoute de la lumière. Est-ce voler que d’emprunter sur la toilette de Monsieur son savon le plus fin ? Avec ses flacons, on se parfume en dimanche ; avec ses fers, on se frise en dimanche ; on passe, on ne sait pourquoi, sa plus belle chemise, celle en dentelles de dimanche, et : « Au revoir, Monsieur ! au revoir, Ali ! au revoir, tout le monde », on claque derrière soi la porte — en dimanche.

— Je suis bien content de vous voir, Mademoiselle. ¦

Ce qu’il dit, il le chuchote ; pas les devinettes de Monsieur, de jolies phrases, des compliments, des promesses comme en trouvait Hector.

— Nous dînerons à la campagne, voulez-vous ?

La campagne ! de la joie qui s’ajoute à votre joie. Voici les arbres, voici les blés, voici un coquelicot tout rouge, voici l’omelette appétissante et jaune, comme le cœur des marguerites. Et, ces oiseaux, écoutez donc, comme ils chantent ; et votre bonheur aussi, comme il gazouille, timide au fond de votre cœur, comme il monte à votre bouche, comme il sort par vos lèvres, et cela fait un baiser. Vienne alors le soir : il y aura sur un banc, près de vous, un jeune homme, sa main qui vous caresse, sa jambe qui vous frôle, tout son désir autour de vous, comme le vôtre autour de lui.

Et quand on le revoit le lendemain, peut-être après une nuit où Monsieur eut tort avec ses devinettes, on rougit comme pour Hector,