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que l’on soit, des patrons qui commandent, et à ce qu’ils commandent, tant qu’on veut penser « zut » et quand même répondre « oui ». À tout ce que la vie commande, penser « zut » et pourtant « oui ».

Un jour il rencontra Émile, vous vous souvenez : « Moi je suis peintre, mon vieux. » Émile dit :

— Et le travail ?… Comment, tu n’as pas le temps ?… Moi, mon vieux, pas de couleurs, pas de pinceaux, pas le temps, je n’aurais rien de ce qu’il faut pour peindre, qu’avec mes doigts, dans du fumier, au milieu de la nuit, je peindrais quand même…

Il était peintre, mon vieux !

— Moi…, pensait Henry.

Bast ! qu’est-ce cela ? J’ai connu un poète. Il n’était pas comme Henry et, là vraiment, dans son bureau, il avait le temps d’être poète. Oh ! des choses qu’il faut qu’on sorte, il n’en avait guère, mais il soufflait dedans et cela devenait gros. Par exemple, il aimait beaucoup les faibles. Il chantait : « Les faibles… les faibles… il faut aimer les faibles… » Ou bien : « Il faut… il faut… il faut aimer les faibles… » Ou bien : « Aimons… aimons… il faut aimer les faibles… » Alors ce poète, qui n’était pas un faible puisqu’il se croyait un fort, quand il parlait et que ce n’était pas en vers, disait :

— Ceux qui n’arrivent pas… ils étaient faibles… Tant pis pour eux.

Henry peut-être connaissait ce poète :

— Tant pis pour moi…

Tant pis pour moi : encore plus on reste sur sa chaise et, près de soi, toutes les idées qui