Page:Baillon - Histoire d'une Marie, 2è édition, 1921.djvu/227

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— La prostitution : un mot. Avec ses doigts, ou quelqu’autre organe, la femme qui travaille, travaille. Un point, c’est tout.

— C’est tout, accepta Henry.

Puis une, qu’il reconnut. Elle ressemblait à la toute première, celle qu’il avait vue à la campagne, mais avec une bouche plus grande et de grands bras pour de grands gestes :

— Pense à tes amis. Rappelle-toi Maurice. Comme toi : « Tout sacrifier à l’Art ». Rappelle-toi Louis : « L’artiste doit être libre ! » Où maintenant ? Des femmes, des gosses, une boîte à mouches. Bouclés, à cracher sur l’Art. Toi, du moins, tu…

— Moi, du moins, je…

Il se campait. Et peut-être pour un Henry n’est-ce que cela. Il cherche, il tâtonne, au juste il ne sait pas, tantôt la main dans le bleu, tantôt les doigts par ailleurs, mais ce qu’il faut humblement, le voici : au bout de sa plume tenir un rien d’encre, et de cette encre, comme les autres avec ce qui sort de leur sexe, produire un peu de vie… Quand c’est ainsi, qu’importe cette belle culotte : la propreté morale ? On est à poil.

Mais alors pourquoi, certain soir, Henry, ta plume, la laissas-tu, ta plume ?

— Je t’accompagne, Marie, tu marcheras devant.

Elle marcha devant. Elle pensait :

— Henry qui me suit, cela me gêne.

Lui :

— Sera-ce celui-ci ? sera-ce celui-là ? Je n’aimerais pas beaucoup que ce fût un de ceux-là.