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— Tout de même, disait Henry, il nous faudra, un de ces jours, aller voir cette brave Tante-Nonne.

Seulement, il remettait, parce qu’on se gêne moins avec les tantes qui sont si bonnes. Alors un soir, il reçut une lettre : « Tante était malade » ; le lendemain une dépêche : « Tante était morte. »

Pauvre Tante-Nonne. Henry fit sa visite, mais pas comme il l’avait cru. Il la fit seul.

La semaine suivante, il dut retourner : il s’agissait d’un testament. Et voici : à soigner pour l’amour du Bon Dieu des fillettes dont on n’est pas la mère, on s’accumule des rentes au ciel, celles qu’on touche sur la terre se dissipent. Tante, qui avait été riche, était presque pauvre ; mais enfin, du peu qu’elle gardait, elle léguait à son neveu une part : deux mille francs.

Cela se passa chez un notaire. Il se trouvait là d’autres « deux mille francs » de la famille. L’argent en poche, peut-être eût-il convenu de rester tous ensemble, de gémir en commun : « Quel malheur, une si brave femme » ou encore : « Ce sont les bons qui partent les premiers. » Henry préféra se taire. Il dit : « Excusez-moi », et sortit.

Une ville à Tante-Nonne en a bien vite fini d’être des maisons et des rues pour redevenir des champs. Les champs sont encore meilleurs. Et puis, il faisait le temps qu’il fallait : par terre un reste de pluie parce qu’il est triste d’avoir perdu sa tante ; mais en haut, du soleil tout plein, pour deux mille francs d’héritage ! Il flâna. Sur le bord de la route, il poussait des buissons. Oh ! pas de ceux — ici du chêne, là de