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calculé : sa vie ne lui avait pas donné l’habitude de ces longues attentes.

Le soir, il la mena jusqu’à sa porte. Il supplia : « Marie, ne me laisse pas seul, cette nuit. » Elle ne voulait pas d’abord.

Elle avait un beau lit, beaucoup plus moelleux que le sien. Il s’y coula, il se fit aussitôt un coin entre ses deux bras de femme où c’est la place de l’homme. Il était maigre, il était frêle : il avait quelque chose d’un petit enfant.

Le matin, il fallut bien, elle le réveilla tôt pour qu’il parte. Le lundi on redevient lingère.

Elle le regarda partir. Il se retournait : ses cheveux sur ses oreilles pendaient comme des oreilles tristes de caniche. Vraiment un drôle de petit bonhomme.

Il avait dit : « C’est long, une semaine sans Marie. » Elle reçut des lettres. Une première disait : « Je suis rentré : comme j’étais seul ! Tu sais, ton boa, une petite plume s’en était détachée par terre ; je l’ai ramassée, je la garde en amour de toi. » Il était inquiet : « Marie, je rêve… Il me semble que tu ne pourras pas m’aimer ; moi, on ne m’a jamais aimé. » Il disait encore : « Marie, tu es ma maîtresse ; mais aussi, tu seras beaucoup ma maman. J’étais trop jeune, quand j’avais une maman… »

Il y a des mots. C’est à cause de ces mots que l’on aime.

Elle ne voulut pas attendre le dimanche. Elle le surprit un soir. Devant sa table, il écrivait :

— Oh ! Marie !

Elle fut maman. Dans un coin, elle trouva