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Parlons actuellement des causes auxquelles doivent être rapportés les effets décrits plus haut ; explications sur les-

    qu’à mesure qu’ils nous environnent de nains, nous devenions des géans ; car tous les jugemens de cette espèce sont comparatifs. Il en est de même des défauts physiques et naturels, qui dépendent aussi d’un défaut de convenance ou de proportion entre certaines parties du corps. Généralenient parlant, le rire fréquent et excessif est un signe de foiblesse : les enfans, les femmes et les eunuques rient beaucoup ; parce qu’en conséquence de leur foiblesse même, et de leur susceptibilité naturelle, ayant un sentiment plus vif des convenances et des proportions, ils ont, par cela seul, la faculté d’apercevoir, d’un coup d’œil, tout ce qui s’en écarte ; aperçu rapide d’où naît ce genre de surprise qui constitue le rire ; sans compter que, sentant leur propre foiblesse, ils sont plus portés à se réjouir de tout désavantage qui, en diminuant le pouvoir d’autrui, semble augmenter le leur. Il n’est point d’individu qui n’ait quelque défaut naturel, et un grain de sottise qu’il ne doit qu’à lui-même : Tout homme qui rit des défauts d’un autre homme, n’est qu’un borgne qui se moque d’un boiteux ; et la bosse d’autrui ne nous redresse point.