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mun de la vision et de la pensée ait besoin d’un certain temps pour se retirer à l’intérieur, et s’y concentrer. Ces différences dont nous parlions d’abord, paroissent dépendre de trois causes. En premier lieu, dans la lecture ou l’observation des objets présens, la force du principe vital est partagée entre la vision et la pensée. En second lieu, il est plus facile, dans la simple méditation d’analyser les idées, c’est-à-dire de les isoler, pour les considérer une à une ; condition toujours nécessaire pour concevoir, juger et inventer nettement et distinctement. Enfin, en présence des objets, on est trop acteur pour être bon spectateur ; on pense plus à soi, et moins a la chose. À ces explications, si elles ne paroissent pas suffisantes, on peut substituer cette raison générale qui semble un peu triviale, et qui n’en vaut que mieux : que l’esprit opère plus aisément et plus exactement, en ne faisant qu’une seule chose, qu’en en faisant deux à la fois. Ainsi je suis persuadé qu’il vaut mieux observer d’abord, écrire ensuite ses observations, puis les ranger dans les tables qu’on va voir ; lire ces tables deux ou trois fois ; enfin, méditer les faits qu’elles renferment, les relire les méditer encore, et ainsi de suite, qu’observer et inventer la plume à la main. En fait de sujets bien familiers, jamais ce qu’on écrit ne vaut ce qu’on dit ; jamais ce qu’on dit n’équivaut à ce qu’on pense ;