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cœur le sentiment de la tendresse[1]. Les individus d’un naturel grave et sérieux, qui sont aussi des hommes d’habitude, et par cela même, d’un caractère

  1. Aimer est un métier qu’on n’apprend, comme tout autre, qu’en l’exerçant ; et la plus douce méthode pour apprendre à aimer, c’est d’être continuellement environné d’objets aimables, comme une femme et des enfans. Un père de famille est continuellement occupé à procurer le nécessaire, l’utile et l’agréable à tout ce qu’il aime ; le célibataire est continuellement occupé à se défendre contre les housards de toute couleur qui veulent piller sa réputation ou sa fortune ; deux genres d’occupations dont les effets sur l’âme doivent être bien différens. Aussi voit-on que le style de la plupart des ecclésiastiques, et sur-tout celui des religieux, est plus sec, plus dur et plus tendu que celui des laïcs mêmes célibataires, dont le prétendu célibat n’est le plus souvent qu’un mariage délayé. Il paroit que l’amour du Créateur, tout sublime et tout saint qu’il est, attendrit moins que l’amour d’une aimable créature. C’est apparemment que cet amour idéal pour l’Être invisible et impalpable, a besoin, pour se réaliser, d’être appliqué à un être visible et palpable.