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des conseils très nuisibles, ou du moins mêlés d’avantages et d’inconvéniens, et qui ne laisseront pas d’être donnés de très

    de consulter d’abord les différens hommes dont il est composé, et de s’en rapporter à la pluralité de ces hommes intérieurs ; à moins qu’une passion tyrannique ne forme en lui une minorité insidieuse qui accapare la majorité et généralise sa propre volonté, en faisant accroire au grand nombre qu’elle est générale. Car alors de même qu’un médecin, qui se sent malade, se défiant de son propre jugement, appelle un autre médecin ; un homme qu’une passion domine, et dont l’âme est malade, doit se défier de sa propre raison, et demander une consultation à un ami sûr, vrai médecin de l’âme. Or tout homme est dominé par une passion quelconque. Ainsi, tout homme qui ne prend conseil que de lui-même, a un sot pour conseiller. Pour se bien conseiller, il faut se bien connoître. Or nul homme ne se voit et n’est vu par les autres précisément tel qu’il est ; car, et l’homme qui se juge lui-même, et ceux qui le jugent, sont juges et parties. Ainsi, pour se bien connoîre, il faut prendre un milieu entre l’idée qu’on a de soi, et l’idée qu’en ont les autres ; comme pour connoître le véritable prix d’une marchandise, il faut prendre un milieu entre le prix du vendeur et ce-