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désir naturel de nuire, et qui semblent se plaire à faire le mal. Le plus foible degré de cette malignité naturelle, c’est un caractère morose, revêche, difficile, contrariant, agressif, malicieux. Mais le plus marqué se décèle par l’envie, et dégénère en méchanceté, proprement dite. Les hommes de ce caractère se réjouissent des disgrâces et des fautes d’autrui : c’est pour eux une sorte de fête, et ils ne manquent guère de les aggraver. Ils cherchent les malheureux dont le cœur est blessé, non comme ces chiens qui lèchoient les plaies du Lazare, mais plutôt comme les mouches qui s’attachent aux parties excoriées et qui enveniment les plaies. Ce sont de vrais misanthropes qui, sans avoir dans leur jardin un arbre aussi commode que celui qu’offroit aux Athéniens certain philosophe atrabilaire, voudroient néanmoins mener pendre tous les hommes. C’est pourtant de ce bois même que se font les grands politiques. Car les hommes de cette trempe peuvent être comparés