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tions, ne l’emporte-t-il pas autant sur les plaisirs des sens, que la jouissance que nous procure l’heureux succès de nos entreprises, l’emporte sur le mince plaisir d’une chanson on d’un repas ? et les plaisirs de l’entendement ne l’emportent-ils pas en même proportion sur les plaisirs dérivés des affections ? Dans les autres genres de volupté, la satiété est voisine de la jouissance ; et pour peu que le plaisir ait de durée, sa fleur et sa beauté se flétrit : ce qui nous apprend que ce ne sont pas là les vraies les pures voluptés ; mais seulement des ombres, des fantômes de plaisir, moins agréables par leur qualité propre, que par la nouveauté. Aussi voit-on souvent les voluptueux finir par se jeter dans un cloître, et la vieillesse des princes ambitieux, presque toujours triste et assiégée par la mélancolie. Au contraire, qui aime la science, ne s’en rassasie jamais ; sa vie est une alternative perpétuelle de jouissance et d’appétit : en sorte qu’on est forcé d’avouer que le bien que procure ce genre