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Verre en main, Jean le vigneron
Chantait les gaîtés de Piron.
            Dodo, l’enfant do,
    L’enfant dormira tantôt.

Sous son chaume, au bruit du pressoir,
Bientôt j’assiste à la vendange.
Plus ivre et plus vieux chaque soir,
Jean va coucher seul dans la grange.
Sa femme, en s’en moquant tout bas,
Me dit : Petiot, ne vieillis pas.
            Dodo, l’enfant do,
    L’enfant dormira tantôt.

Un moine, en voisin, vint chez nous :
Il entre sans que le chien jappe ;
Le mari sort, et l’homme roux
De ma table fripe la nappe.
Hélas ! l’odeur du Récollet
Fait pour neuf mois tourner mon lait.
            Dodo, l’enfant do,
    L’enfant dormira tantôt.

Au vieux moutier, huit jours plus tard,
Jean, bien payé, soignait la vigne.
Moi, gai comme un dieu sans nectar,
Au vin du cru je me résigne.
Ma nourrice, en m’en abreuvant,
Soupire et dit : Chien de couvent !
            Dodo, l’enfant do,
    L’enfant dormira tantôt.