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Modeste et bon, cet homme vertueux,
Privé des biens que l’opulence affiche,
A semblé pauvre au riche fastueux,
Et par ses dons au pauvre a semblé riche.
Cessez vos chants, prêtres ; c’est à ma voix
De le bénir pour la dernière fois.

Las, sur les flots, d’aller rasant le bord,
Je saluai sa demeure ignorée.
Entre, et, chez moi, dit-il, comme en un port,
Raccommodons ta voile déchirée.
Cessez vos chants, prêtres ; c’est à ma voix
De le bénir pour la dernière fois.

Proclamé roi de ses festins joyeux,
À son foyer je fais sécher ma lyre.
J’y vois pour moi se dérider les cieux
Et mon pays daigne enfin me sourire.
Cessez vos chants, prêtres ; c’est à ma voix
De le bénir pour la dernière fois.

À mes chansons que sa joie applaudit !
Sur mes succès son cœur s’en fait accroire,
Et s’enivrant des fleurs qu’il me prédit,
Prend leur parfum pour un encens de gloire.
Cessez vos chants, prêtres ; c’est à ma voix
De le bénir pour la dernière fois.

Au peu d’éclat dont je brille à présent,
Ah ! qu’il ait part, et puisse à ma lumière,
Comme au flambeau que porte un ver luisant,
Long-temps son nom se lire sur la pierre b* !