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Périr tous ceux qui vous ont détrôné !
        Vite un prix au sot qui l’adule !
Mon fils, dit-il, tout sceptre est un grand poids.
        Sois mon second, prends la férule.
Jamais l’exil n’a corrigé les rois.

        Un autre en secret vient lui dire :
        Seigneur, un écolier transcrit,
        Là bas, je crois, quelque satire ;
C’est contre vous, car voyez comme il rit !
        Ce maître d’humeur répressive,
De l’accusé courant tordre les doigts,
        Dit : Je ne veux plus qu’on écrive.
Jamais l’exil n’a corrigé les rois.

        Rêvant un jour que l’on conspire ;
        Rêvant qu’il court de grands dangers,
        Ce fou, tremblant pour son empire,
Voit ses marmots narguer deux étrangers.
        Chers étrangers, dans ce repaire
Entrez, dit-il ; sur eux vengez mes droits ;
        Frappez ; pour eux je suis un père.
Jamais l’exil n’a corrigé les rois.

        Enfin, pères, mères, grand’mères
        De maint enfant trop bien fessé,
        L’accablant de plaintes amères,
L’ancien tyran de Corinthe est chassé.
        Mais pour agir encore en maître,
Maudire encor sa patrie et ses lois,
        De pédant, Denys se fait prêtre.
Jamais l’exil n’a corrigé les rois.