Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 3.pdf/345

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

poëte excelle. Oui, l’amour de la patrie, l’amour de la France, voilà ce qui, dans ses vers, au milieu des banquets, ou des rêveries de la solitude, a fait battre le cœur de ses concitoyens, voilà ce qui a fait son immense popularité. En quelque lieu qu’il se présente, en France, à l’étranger, il est sûr de trouver des admirateurs, des amis. Ô vous, messieurs, qui devez représenter le pays, ne dites pas au roi qu’un tel homme n’a pour lui que des injures ; ne dites pas au poëte que les autres nations nous envient, que la France n’a pour lui qu’une prison. Je compte sur son absolution. »


Me Barthe s’assoit au milieu d’un murmure d’approbation universelle.


Me Berville, défenseur de M. Baudouin, se lève :

« Messieurs, dit-il, en défendant la cause d’un simple libraire, je n’ose espérer pour mes paroles ni le même intérêt ni la même faveur que pour celles que vous venez d’entendre. Le défenseur de M. de Béranger pouvait, avec autant de convenance que d’autorité, revendiquer en faveur du premier poëte de notre époque, l’inviolabilité du talent. Il pouvait faire valoir, à l’appui de sa cause, des considérations qui ne sont pas seulement littéraires. L’orateur de Rome ne dédaigna pas de les invoquer en faveur du poëte Archias ; elles déterminèrent le parlement de Toulouse à faire valoir le testament de Bayle, infirmé par les lois, validé par les travaux et la gloire de son auteur. Elles ont désarmé plus d’une fois jusqu’au terrible droit de la guerre, protégé la maison de Pindare contre la victoire d’Alexandre, et la tombe de J.-J. Rousseau contre les rigueurs de l’invasion étrangère.