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des arrêts de la Justice, c’est se révolter contre la société elle-même. Ils penseront que si cette téméraire inconvenance n’est pas un délit, du moins ne peut-on pas en faire un moyen spécieux pour exercer un délit véritable, tel que celui de la réimpression d’écrits condamnés : qu’ici la loi et la Justice sont à la fois bravées ; que si, dans ces agressions dérisoires, l’autorité légale était vaincue, l’état serait bientôt abandonné à l’insurrection et à l’anarchie, en telle sorte qu’au nom des lumières ils nous ramèneraient à la barbarie, avec cette différence, que si l’on sort de la barbarie fort de croyance, d’illusion et de vertu, on y rentre par l’incrédulité, la faiblesse et les sophismes. »

Me Dupin commence en ces termes[1] :


« Messieurs Les Jurés,

« Si nous étions en pays d’inquisition, le téméraire qui aurait osé divulguer quelque procédure du saint tribunal pourrait être taxé d’indiscrétion, et son tort pourrait être facilement transformé en crime d’état. En effet, révéler les secrets du despotisme, les montrer au grand jour, c’est par cela seul le frapper de mort.

« Mais dans un pays qui fut toujours franc et toujours libre, dans une monarchie qui, de tout temps, fut tempérée ou par les lois ou par les mœurs et le caractère national, quelquefois même par le bon naturel et la générosité de ses rois ; sous un gouvernement aujourd’hui représentatif, et dont la

  1. Le plaidoyer de Me Dupin n’ayant pas été sténographié, nous ne pouvons en offrir qu’une analyse telle que l’ont donnée les journaux, et principalement le Courrier français et le Journal des Débats, qui en ont rendu compte avec le plus d’étendue et d’exactitude.