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certains intérêts ; c’est cette raison supérieure qui nous éclaire sur le juste et l’injuste ; c’est cette voix qui n’est que le cri de la bonne conscience ; ces vérités éternelles, immuables, indélébiles, que Dieu a gravées dans le cœur de tous les hommes ; qui, dans tous les temps, comme dans tous les pays, servent à régler leur conduite et à la diriger vers le bien ; qui prescrivent la fidélité dans les engagements, le respect de tous les devoirs, et constituent, à proprement parler, le droit naturel.

« Mettez même dans une chanson qu’on peut voler le bien d’autrui, qu’on peut être fourbe dans les affaires publiques ou particulières, ce sera un outrage à la morale publique, parce que professer de telles maximes, c’est attaquer la société dans son essence, comme un coup de poignard attaque la vie dans sa source.

« La morale religieuse n’est pas non plus la morale de telle ou telle secte. Ce n’est pas plus celle de l’Alcoran que celle des rabbins ; celle des catholiques, que celle des luthériens, des calvinistes ou des anglicans : c’est cette idée si vaste, si consolante, si bien comprise de tous les peuples de la terre, qu’il est un Dieu souverain, créateur de toutes choses ; cette confiance qui n’a pu nous être inspirée que de Dieu même, que notre âme est immortelle, et qu’il est une autre vie où chacun recevra la récompense ou la punition de ses bonnes ou mauvaises actions.

« Telle est, messieurs, la morale religieuse qu’on ne peut pas outrager sans encourir les peines établies par la loi dont je développe en ce moment l’esprit.

« Voilà notre loi actuelle telle qu’elle a été conçue et portée. Vous vous rappelez qu’on voulait y introduire les mots religion chrétienne, afin de faire un délit spécial des offenses dirigées contre cette re-