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nesse les grâces de la modestie et les avantages de la docilité ; seule elle peut se charger d’une partie des désirs tumultueux dont la terre est obsédée ; seule encore elle peut creuser un lit profond et paisible à ces ambitions désordonnées qui mugissent sur la surface de la France, comme des torrents qui menacent de tout envahir ; seule enfin, elle peut verser un baume réparateur sur tant de plaies toujours saignantes, et triompher des ressentiments et des partis.

« Voilà pourquoi nos législateurs ont pensé, en discutant la loi répressive des abus de la presse, qu’il ne fallait pas seulement punir la sédition, mais encore l’impiété. La sédition n’a que des accès passagers, mais l’impiété s’étend sur des générations entières ; la sédition n’éclate souvent que sur les sommités sociales, tandis que l’impiété ronge les fondements des nations. Ah ! qu’importe que la révolution ne soit plus dans les actes, si elle est toujours dans les mœurs ! Ils se trompent ceux-là qui ne la voient que dans un violent changement de gouvernement, et qui se croient hors de son tourbillon lorsqu’ils n’entendent parler ni de république, ni de consulat, ni d’empire. Ce sont là les effets et non pas les causes. La révolution n’est pas seulement dans la substitution d’un usurpateur à un ordre de choses consacré, elle est surtout dans le néant de ces cœurs enflés d’un orgueilleux mépris pour les dogmes de la morale et de la vertu ; elle n’est pas seulement dans les entreprises des factions qui détrônent le prince légitime, elle est surtout dans la propagation des doctrines irréligieuses qui voudraient détrôner le Souverain suprême, le maître des siècles et des rois ; oui, elle est dans la révolte