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Les eaux d’un fleuve bien mondain
Vont laver mon âme chrétienne :
On m’offrit de l’eau du Jourdain ;
Et cependant je suis à Vienne !

Ces juges, ces pairs avilis,
Qui te prédisent des merveilles,
De mon temps juraient que les lis
Seraient le butin des abeilles.
Parmi les nobles détracteurs
De toute vertu plébéienne,
Ma nourrice avait des flatteurs ;
Et cependant je suis à Vienne !

Sur des lauriers je me couchais ;
La pourpre seule t’environne.
Des sceptres étaient mes hochets ;
Mon bourlet fut une couronne.
Méchant bourlet, puisqu’un faux pas
Même au Saint-Père ôtait la sienne.
Mais j’avais pour moi nos prélats ;
Et cependant je suis à Vienne !

Quant aux maréchaux, je crois peu
Que du monde ils t’ouvrent l’entrée ;
Ils préfèrent au cordon bleu,
De l’honneur l’étoile sacrée.
Mon père à leur beau dévoûment
Livra sa fortune et la mienne.
Ils auront tenu leur serment ;
Et cependant je suis à Vienne !