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pements de son intelligence et de ses sentiments moraux, ce fut l’école primaire fondée à Péronne par M. Ballue de Bellanglise, ancien député à l’assemblée législative. Dans son enthousiasme pour Jean-Jacques, ce représentant avait imaginé un institut d’enfants d’après les maximes du citoyen-philosophe : l’institut de Péronne offrait à la fois l’image d’un club et celle d’un camp ; les enfants y portaient le costume militaire ; à chaque événement public, ils nommaient des députations, prononçaient des discours, votaient des adresses : on écrivait au citoyen Robespierre ou au citoyen Tallien. Le jeune Béranger était l’orateur, le rédacteur habituel et le plus influent. Ces exercices, en éveillant son goût, en formant son style, en étendant ses notions d’histoire et de géographie, avaient en outre l’avantage d’appliquer de bonne heure ses facultés à l’étude de la chose publique, et fiançaient en quelque sorte son jeune cœur à la patrie. Mais, dans cette éducation toute citoyenne, on n’enseignait pas le latin ; Béranger ne l’apprit donc pas.

Cette omission dans l’instruction du futur poëte ne fut pas aussi importante que les préjugés que nous rapportons des collèges pourraient nous le faire croire. Un des hommes qui ont le plus cultivé la littérature latine, un professeur qui s’est occupé avec amour des études classiques, rend, sous ce rapport, une complète justice à Béranger. C’est le fond et non la forme qu’il faut étudier : la liqueur seule donne du parfum au vase ; la pensée est une, immuable, éternelle : la forme varie de peuple à peuple et souvent d’homme à homme.

« Béranger, dit M. Tissot, a toujours affirmé qu’il ne savait pas les langues classiques : on ne peut guère douter