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donnée de venir passer quelques minutes avec nous. C’était, je crois, le dimanche avant-midi.

Ce jour-là, vers midi, le major Von Wilm nous rendit visite dans cette chambre d’hôtel convertie en cellule de prison. Un nuage semblait obscurcir sa figure : il était mal à l’aise, ses traits, son attitude même décelaient l’anxiété et le malaise. Il nous apportait une terrible nouvelle : — « Je suis désolé, disait-il, je suis désolé, mais M. Béland doit partir aujourd’hui même pour l’Allemagne. »

On imagine quelle consternation ce fut pour ma femme et pour moi. J’ose protester. Je rappelle à la mémoire du major toutes les assurances qu’il m’a données ; je répète qu’il était entendu qu’en ma qualité de médecin je ne pouvais être privé de ma liberté ; je lui demande comment il se fait que les autorités compétentes, à Berlin, n’aient pas été mises au courant des services médicaux que je rendais à l’hôpital, ainsi que chez la population civile depuis le début de la guerre ; enfin, je fais tout un plaidoyer. Consterné, très embarrassé, le major balbutie quelques explications : les instructions lui étaient venues d’une autorité supérieure à la sienne ; il avait tenté de donner des explications à mon sujet, mais l’on n’avait voulu rien entendre. Des ordres formels lui enjoignaient d’interner tous les sujets britanniques, et de les envoyer en Allemagne sans délai.

On avait disposé de mon cas en haut lieu : toute récrimination était peine perdue. Le major avait