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MILLE ET UN JOURS

tions communales se fissent les complices de ces recrutements odieux. De par leur situation légale et en conscience, elles ne le pouvaient pas. Mais elles pouvaient éclairer les recruteurs et ont qualité pour cela. Les prêtres, qui connaissent mieux que personne le petit peuple, seraient pour les recruteurs des auxiliaires précieux. Pourquoi refuse-t-on leur concours ?

À la fin de sa lettre, Votre Excellence rappelle que les hommes appartenant aux professions libérales ne sont pas inquiétés. Si l’on emmenait que des chômeurs, je comprendrais cette exception. Mais si l’on continue d’enrôler indistinctement les hommes valides, l’exception est injustifiée.

Il serait inique de faire peser sur la classe ouvrière seule la déportation. La classe bourgeoise doit avoir sa part dans le sacrifice, si cruel soit-il et tout juste parce qu’il est cruel, que l’occupant impose à la nation. Nombreux sont les membres de mon clergé qui m’ont prié de réclamer pour eux une place à l’avant-garde des persécutés. J’enregistre leur offre et vous la soumets avec fierté.

Je veux croire que les autorités de l’Empire n’ont pas dit leur dernier mot. Elles penseront à nos douleurs imméritées, à la réprobation du monde civilisé, au jugement de l’histoire et au châtiment de Dieu.

Agréez, Excellence, l’hommage de ma très haute considération.

D.-J. Cardinal MERCIER,
Archevêque de Malines.

Après cette lettre cinglante, le gouverneur général ne dit plus rien. Du moins, à l’heure où s’imprime cette brochure, on ignore encore s’il trouva quelque réponse à y faire.