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soins à quelques-uns d’entre eux. Durant le jour, je faisais la visite des malades en allant de cellule en cellule, mais durant la nuit, comme toutes les portes des cellules étaient fermées à clef, depuis sept heures du soir jusqu’à huit heures le lendemain matin, il fallait qu’un sous-officier vînt me quérir. Ces cas se présentaient assez souvent. J’étais encore appelé chaque fois qu’un prisonnier avait attenté à ses jours. J’ai pu constater une dizaine de cas de suicide : les uns au revolver, d’autres au moyen d’un rasoir, ou par la strangulation. Rien n’était plus triste qu’une détonation entendue au milieu de la nuit dans cette sombre prison ; les murs en étaient secoués ; tous les prisonniers étaient arrachés à leur sommeil, et chacun se demandait quel pouvait être le malheureux qui venait d’attenter à ses jours. Quelques minutes plus tard, invariablement, ma cellule était ouverte, un sous-officier se présentait, et j’étais prié de l’accompagner, soit pour constater la mort, soit pour donner des soins à un malheureux agonisant.

Les soins médicaux que je pouvais donner à tous les prisonniers sans distinction, et même aux sous-officiers, quand ils les requéraient, avaient naturellement disposé en ma faveur la plupart des surveillants, et la liberté de mouvement dont je jouissais comme médecin à l’intérieur de la prison, — que l’on n’a jamais ou à peu près jamais tenté de restreindre, me permit de rendre beaucoup de services à des prisonniers miséreux, soit en leur apportant des médicaments, soit en leur fournissant des vivres. J’ai