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— 94 — siècles, leurs hauts faits étaient célèbres en Europe. Depuis des siècles , dans les gymnases d'Athènes et d'Alexandrie , sans attendre que Bidpaï fût venu, on faisait apprendre aux petits enfants les mêmes apologues que nous lisons dans le Pantchatan- tra ou le Mahâhhàrata : le Lion malade^ les Grenouilles qui demandent un roi, VHomme et le Serpent. Dans les écoles romaines, Orbilius le fouetteur enseignait à Horace la fable de la Montagne qui accouche d'une souris^ le Rat de ville et le Rat des champs. D'où venaient les fables grecques? Nous n'avons pas à répondre à cette question. Mais parcourons rapidement les systèmes pro- posés : cette revue est fort instructive; on verra pourquoi. A. — Analyse des principales théories Négligeons les différentes traditions que les Grecs, déjà préoc- cupés du problème, conservaient, soient qu'ils fissent venir les fables de l' Asie-Mineure, les uns de la Phrygie, les autres de la Carie ou de la Gilicie ; d'autres encore tenant pour une origine ly bique ou sybaritique, voire attique *. Parmi les théories modernes, pour laisser de côté le fantôme, évoqué par Grimm ^, aujourd'hui dissipé, de l'épopée animale indo-européenne, quel est le pays où l'idée préconçue qu'il existe quelque part un réservoir primitif des contes, n'ait fait chercher la patrie des apologues grecs? On l'a cherchée, donc trouvée, en Arabie d'abord 3, puis en Egypte^, même en Palestine^, tandis . Ces traditions sont savamment exposées et discutées par O. Keller, Ueher die Geschichte der griechischeii Fabel, pp. 350-360. . Dans son Reinhart Fuchs (Berlin, 1834). . D'Herbelot, au xviii^ siècle. . D après Zûndel, qui convainquit le grand Welcker, les fables grecques refléteraient parfaitement les symboles égyptiens, et le personnel animal des fables ésopiques conviendrait exclusivement à l'Egypte. Esope serait un Ethiopien. (Ziindel, Rheinisches Muséum, 1847. V. la réfutation de Wagener, Essai sur les rapports entre les apologues de la Grèce et de l'Inde, pp. 49-53.) . Faut-il mentionner la Palestine ? Le système de Julius Landsberger [die Faheln des Sophos, syrisches Original der griechischen Faheln des Syntipas, 1859) d'après lequel Esope serait un Syrien, et les Juifs les inventeurs de la Fable, a été si mal accueilli que, seul, son inventeur paraît y avoir jamais cru. (V. O. Keller, loc. cit., p. 328, ss.)