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âme avec une simplicité, une abondance, qui démontrent l’absence de tout fiel, de tout ressentiment. La bonté parfaite n’a pas de signe plus touchant, de caractère plus inimitable. Il y a plus : dans ces Confessions, écrites sous le poids de la désolation, et presque sous les glaces de l’âge, J.-J. Rousseau met, pour la première fois, de l’amabilité, de la légèreté, de la grâce ; là, seulement, l’homme de génie disparaît pour faire place à l’homme d’esprit. Persuadé, et non tout-à-fait sans raison (l’homme impartial en trouverait encore parmi nous plus d’un témoignage), persuadé que le fanatisme, le ressentiment et l’envie ont armé contre lui une partie de la génération contemporaine, qu’il a été dépeint comme un monstre, comme un des êtres les plus odieux et les plus dangereux, il entreprend de se montrer tel qu’il est, tel qu’il se voit lui-même, afin, s’il est possible, de détromper l’injustice, et de désarmer la haine par la publicité de son caractère et de ses intentions. Un homme, dont les intentions, nécessairement connues de lui-même, auraient mérité la haine et le blâme, ne se serait point justifié avec douceur ; pour déguiser ses aveux secrets, il aurait publiquement employé tout ce qu’il aurait eu d’adresse, de force,