Page:Avezac-Lavigne - Diderot et la Société du baron d’Holbach, 1875.djvu/199

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pensée modelée en terre qui fut généralement admirée. Le prince de la littérature y est assis sur une draperie qui lui descend de l’épaule gauche par le dos, et enveloppe tout son corps par derrière. Il a la tête couronnée de lauriers ; la poitrine, la cuisse, la jambe et le bras droit nus. Il tient de la main droite, dont le bras est pendant, une plume. Le bras gauche est appuyé sur la cuisse gauche. Toute la position est de génie. Il y a dans la tête un feu, un caractère sublimes ; et si l’artiste réussit à faire passer ce caractère dans le marbre, cette statue l’immortalisera plus que tous ses précédents ouvrages. »

Cette résolution, prise chez madame Necker, le grand nombre des personnages qu’elle recevait prouvent combien son salon avait acquis d’importance ; et, en même temps, cela témoigne de l’habileté et du tact qu’elle dut déployer pour faire de son hôtel du Marais le centre de réunion de tant d’hommes distingués.

Madame Necker était la fille d’un M. Curchod, ministre de Crassi, village situé dans les montagnes qui séparent le pays de Vaud de la Franche-Comté. Dans la solitude où ses fonctions l’obligeaient à vivre, ce pasteur s’appliqua à donner à sa fille une éducation plus soignée que celle que recevaient alors les jeunes personnes. Pendant les courtes visites que fit à Lausanne mademoiselle Suzanne Curchod, dit Gibbon[1], qui en devint amoureux, comme un

  1. Voy. les Mémoires de Gibbon.