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« Oublions, dit-il à propos de cette loi, oublions pour l’honneur de la France, qu’il ait existé un temps où les enfants d’une même patrie, bien loin de s’entr’aider dans la détresse, s’arrachaient l’un à l’autre le pain de la bouche en vertu d’édits donnés de par le même roi. Effaçons du souvenir des hommes qu’autrefois un intendant pouvait dire à l’intendant, son voisin : « Les peuples de ton intendance mourront de faim et les miens regorgeront de blé, » et cela dans la même année où l’on voyait les recrues, levées dans les deux intendances, marcher sous le même drapeau contre le même ennemi. Si nous gardons sur cela un peu de silence, l’honneur de la France sera sauvé, car la postérité n’en croira rien. »

Le livre de Galiani, avons-nous dit, causa au sein de l’école des économistes une profonde émotion ; mais, lors de sa publication, l’abbé était absent, il avait été rappelé à Naples pour y remplir la place de conseiller du commerce. Il n’apprit que par madame d’Épinay, avec qui il entretenait une correspondance suivie, la vive impression que son livre avait produite ; et, malgré le goût qu’il avait pour la France et pour la société parisienne, il se félicitait, dans ses réponses, d’être à l’abri des traits que ses adversaires ne devaient pas manquer de diriger contre lui.

Madame Necker, dès que les Dialogues parurent,s’empressa d’en envoyer un exemplaire au patriarche de Ferney qui, sans prendre parti pour ou contre dans la question du commerce des grains, lui ré-