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tune, s’efforçait sans doute de mériter, par ses services, l’intérêt du prince de Saxe-Gotha et de l’impératrice de Russie. Chargé d’affaires de la ville de Francfort, il aspirait à un emploi en rapport avec ses talents, et, pour y parvenir, il ne négligeait aucune démarche ; son ambition n’échappait pas à Diderot, qui l’appelait ironiquement Monsieur l’Ambassadeur. Il y a tout lieu de croire que ce n’était pas par une exagération satirique, que Rousseau l’accusait d’avoir pris un ton avantageux ; et certains indices conduisent à penser qu’il était un peu despote ; aussi ses amis lui avaient-ils donné le surnom de Tyran-le-Blanc[1]. Plus tard, nous le verrons tourmenter le Philosophe pour avoir ses salons et lui adresser des reproches, très-injustes, sur sa prétendue négligence.

  1. Tyran-le-Blanc est le titre d’un roman de M. de Caylus. Grimm, dans sa correspondance, rapporte cette anecdote sur le comte de Caylus : « Longtemps avant de mourir, il avait été attaqué d’une maladie dangereuse dans le temps que son oncle, le célèbre évêque d’Auxerre, janséniste, vivait encore. Ce prélat et tous ses parents étaient autour de son lit et cherchaient une tournure pour lui proposer les sacrements. Je vois bien, leur dit le malade, que vous voulez me parler pour le bien de mon âme..... Tout le monde se sentit soulagé à ces mots..... Mais, continua-t-il, je vais vous dire mon secret, c’est que je n’en ai point… » Diderot fit pour lui cette épitaphe, qui ne donne pas une idée avantageuse de son caractère :

    Ci-gît un antiquaire acariâtre et brusque ;
    Ah ! qu’il est bien placé dans cette cruche étrusque !

    Amateur distingué, il encourageait les artistes et cultivait lui-même avec succès les arts du dessin, en particulier la gravure. Sa mère, madame de Caylus, a laissé des Souvenirs dont Voltaire a donné une édition imprimée à Ferney.