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Si tu m’aymes de cœur je diray que jamais
A tel degré d’amour femme ne sçeut atteindre,
Si tu ne m’ayme point, je diray desormais
Que jamais je n’en vy qui sçeussent si bien feindre.
Je sçay bien que logeant si haut mes passions
Je n’en dois esperer qu’une cheute mortelle,
Mais pour quoy cederay-je à tes perfections,
Ne suis-je aussi constant que tu me semble belle.
Ouy, mon extresme amour égale ta beauté,
Tes vertus et ma foy dans un moule sont faictes,
Joinct que mon cœur se sent en si bon lieu planté
Qu’il ne sçauroit aymer que les choses parfaictes.
O puissant Cupidon ! Si je suis bien aymé
Ne perisse jamais mon amoureuse flame,
Si non esteins le feu que tu m’as allumé
Et brize le pourtraict que je porte en mon ame.

Qu’il ne m’en reste rien qu’un despit desormais
D’avoir tant honoré une ingratte mocqueuse,
De toutes celles-là qui aymerent jamais
La plus dissimulée et la moins amoureuse.
Que dis-je ? Amour, pardonne à mon feu violent,
Si mon traict jusqu’au vif n’entame sa poictrine :
Ce m’est assez d’honneur qu’elle en faict le semblant,
Et suis assez content puis que je l’imagine.
Quelle ayme, ou n’ayme pas, je l’aimeray tousjours,
Et si ses cruautez veulent avoir la gloire
D’attaquer au combat mes fideles amours,
Je suis bien asseuré d’emporter la victoire.