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de vous m’imposera silence à jamais. »

L’émotion et l’embarras d’Elisabeth augmentèrent. Elle ne savoit comment répondre, et pourtant il falloit parler. En hésitant beaucoup, et en s’interrompant sans cesse ; elle lui laissa pourtant voir qu’il s’étoit fait un grand changement en elle, et qu’elle recevoit avec plaisir cette assurance inattendue.

Darcy écouta cet aveu avec transport et exprima toute la violence de sa passion. Si Elisabeth eût osé lever les yeux, elle auroit vu combien sa physionomie étoit animée et son regard expressif. Il parloit avec une éloquence et une chaleur de sentiment qui la charmoit, et chacune de ses paroles lui faisoient mieux apprécier le bonheur d’avoir fixé le cœur d’un tel homme.

Elle apprit que ce qui avoit amené l’explication étoit une conversation qu’il avoit eue avec sa tante, et dans laquelle après avoir raconté à sa manière la visite qu’elle avoit faite à Longbourn, elle avoit tâché d’obtenir de lui la promesse formelle de renoncer à Elisabeth. C’est ce que m’a dit lady Catherine, „ ajouta-t-il, « qui m’a rendu l’espérance. Je vous connoissois assez pour être sûr que si vous aviez été irrévocablement décidée contre moi, vous l’auriez dit franchement. »