Page:Austen - Les Cinq filles de Mrs Bennet.djvu/350

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tience à plus rude épreuve ; et quoique Mrs. Philips se sentît en sa présence trop intimidée pour parler avec la familiarité que la bonhomie de Bingley encourageait, elle ne pouvait pas ouvrir la bouche sans être commune, et tout le respect qu’elle éprouvait pour Darcy ne parvenait pas à lui donner même un semblant de distinction. Elizabeth fit ce qu’elle put pour épargner à son fiancé de trop fréquentes rencontres avec les uns et les autres ; et si tout cela diminuait parfois un peu la joie de cette période des fiançailles, elle n’en avait que plus de bonheur à penser au temps où ils quitteraient enfin cette société si peu de leur goût pour aller jouir du confort et de l’élégance de Pemberley dans l’intimité de leur vie familiale.




LXI


Heureux entre tous, pour les sentiments maternels de Mrs. Bennet, fut le jour où elle se sépara de ses deux plus charmantes filles. Avec quelle satisfaction orgueilleuse elle put dans la suite visiter Mrs. Bingley et parler de Mrs. Darcy s’imagine aisément. Je voudrais pouvoir affirmer pour le bonheur des siens que cette réalisation inespérée de ses vœux les plus chers la transforma en une femme aimable, discrète et judicieuse pour le reste de son existence ; mais il n’est pas sûr que son mari aurait apprécié cette forme si nouvelle pour lui du bonheur conjugal, et peut-être valait-il mieux qu’elle gardât sa sottise et ses troubles nerveux.

Mr. Bennet eut beaucoup de peine à s’accoutumer au départ de sa seconde fille et l’ardent désir qu’il avait de la revoir parvint à l’arracher fréquemment à ses habitudes. Il prenait grand plaisir à aller à Pemberley, spécialement lorsqu’on ne l’y attendait pas.