Page:Austen - Les Cinq filles de Mrs Bennet.djvu/264

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Oh ! Jane, si seulement nous avions été moins discrètes ! Si nous avions dit ce que nous savions ! Rien ne serait arrivé.

— Peut-être cela eût-il mieux valu, mais nous avons agi avec les meilleures intentions.

— Le colonel Forster a-t-il pu vous répéter ce que Lydia avait écrit à sa femme ?

— Il a apporté la lettre elle-même pour nous la montrer. La voici.

Et Jane la prenant dans son portefeuille la tendit à Elizabeth.

La lettre était ainsi conçue :


« Ma chère Harriet,


« Vous allez sûrement bien rire en apprenant où je suis partie. Je ne puis m’empêcher de rire moi-même en pensant à la surprise que vous aurez demain matin, lorsque vous vous apercevrez que je ne suis plus là.

« Je pars pour Gretna Green, et si vous ne devinez pas avec qui, c’est que vous serez bien sotte, car il n’y a que lui qui existe à mes yeux ; c’est un ange, et je l’adore ! Aussi ne vois-je aucun mal à partir avec lui. Ne vous donnez pas la peine d’écrire à Longbourn si cela vous ennuie. La surprise n’en sera que plus grande lorsqu’on recevra là-bas une lettre de moi signée : Lydia Wickham. La bonne plaisanterie ! J’en ris tellement que je puis à peine écrire !

« Dites à Pratt mon regret de ne pouvoir danser avec lui ce soir. Il ne m’en voudra pas de ne point tenir ma promesse, quand il saura la raison qui m’en empêche.

« J’enverrai chercher mes vêtements dès que je serai à Longbourn, mais je vous serai reconnaissante de dire à Sally de réparer un grand accroc à ma robe de mousseline brodée avant de l’emballer.

« Mes amitiés au colonel Forster ; j’espère que vous boirez tous deux à notre santé et à notre heureux voyage.

« Votre amie affectionnée,

« Lydia. »