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une situation qui ne laisserait rien à desirer ni à lui ni à son Alice : il avait toujours été heureux, il le serait sûrement encore. Ces espérances, exprimées avec le feu qui le caractérisait, animées encore par son amour, auraient suffi à la jeune fille, qui ne doutait de rien quand Frederich Wentworth avait parlé, mais non à lady Russel, qui voyait ces espérances sous un jour bien différent. Cette imagination vive et brillante d’un ardent jeune homme lui parut la preuve d’une extrême légèreté et d’une mauvaise tête, qui, sous aucun rapport, ne pouvait faire le bonheur de sa chère Alice. Lady Russel avait peu de goût pour l’esprit et l’imagination, et une aversion prononcée pour tout ce qui s’écartait de la droite ligne de la prudence ; elle ne vit qu’une folie dans l’amour de ces jeunes gens, et travailla de tout son pouvoir à guérir au moins le cœur de sa fille adoptive : tout ce qu’elle dit dans ce but était si fort et paraissait si sensé, qu’Alice, sans être convaincue, ne trouvait rien à répondre. Quoique jeune, timide, n’étant encouragée par aucune indulgence de son père, par aucune consolation de sa sœur, elle aurait peut-être trouvé dans son amour la force