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ne tarda pas, des deux côtés, à devenir une inclination très-vive et très-réciproque. Il serait difficile de dire lequel aima l’autre le premier ; le même trait sympathique les frappa soudain ; chacun d’eux voyait dans l’objet de son amour la perfection idéale ; on aurait eu grande peine à décider lequel des deux fut le plus heureux, d’Alice en recevant l’aveu de son amour et l’offre de sa main, ou de Frederich lorsque l’un et l’autre furent acceptés ; mais cet instant de félicité suprême où deux cœurs unis s’entendent, se répondent, espèrent un bonheur inaltérable, ne tarda pas à s’évanouir. Wentworth fit sa demande en forme au père de son Alice ; sir Walter, sans donner ni refuser son consentement, témoigna seulement une grande surprise, une froideur dédaigneuse, un silence offensant, déclarant qu’il ne ferait rien pour sa fille, et surtout pour un tel mariage ; un gendre, simple officier de marine, frère d’un curé, lui paraissait une dégradation pour le nom d’Elliot et la fille d’un baronnet ; et lady Russel, influencée par ses préjugés en faveur des titres, et par l’idée que sa chère Alice ne pouvait manquer de trouver un parti plus brillant, pensa de même ; il lui parut insensé de donner Alice Elliot avec sa naissance,