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passé avec lady Russel avait été marqué pour elle par un chagrin très-vif qui décolorait encore tous les objets. Lady Russel, au contraire, aimait Bath passionnément ; il lui paraissait impossible qu’Alice, aimable et bonne comme elle était, ne s’y plût pas autant qu’elle y plairait elle-même. Alice avait vécu trop retirée, elle était trop peu connue ; une défiance d’elle-même, suite naturelle de la manière dont on la traitait chez son père, la rendait timide et silencieuse ; son amie espérait qu’une société plus nombreuse l’animerait, et la ferait paraître à son avantage.

C’était beaucoup sans doute d’avoir obtenu de sir Walter de quitter son château ; mais ce n’était pas tout, et le plus difficile restait à faire ; c’était de l’engager à louer cette belle demeure : passe encore de ne plus l’habiter, mais la voir habitée par une autre personne, était une épreuve de courage à laquelle des têtes plus fortes que celle de sir Walter auraient succombé : il ne pouvait supporter l’espèce de dégradation qu’il trouvait à être obligé de louer sa maison. Sir Shepherd, qui, dans son zèle pour le libérer de ses dettes, lui avait le premier présenté cette idée, en lui offrant de mettre un avis dans les papiers publics,