Page:Austen - La Famille Elliot T1.djvu/150

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Si changée qu’il avait eu peine à la reconnaître ! ces mots étaient sans cesse répétés par la triste Alice ; cependant elle en vint bientôt à se réjouir de les avoir entendus ; ils devaient calmer son imagination, détruire toute espèce d’illusion, guérir son cœur, et la rendre moins malheureuse.

Frederich Wentworth avait en effet dit cela, ou quelque chose de semblable, mais sans aucune idée qu’on pût le répéter à miss Elliot. Il se faisait d’elle, lorsqu’il y pensait, une idée si charmante, qu’il la trouva excessivement changée, et dans le premier moment d’un appel à son jugement sur elle, il dit ce qu’il pensait. Alice telle qu’il l’avait vue en s’attachant à elle, était encore à ses yeux la première des femmes ; pour le genre de figure et le fond du caractère, il n’en avait point trouvé qu’on pût lui comparer ; mais son amour et son amour-propre blessés par un refus, et surtout huit ans d’absence, avaient détruit sa passion ; il n’en restait plus la moindre trace ni dans son cœur ni dans son esprit au moment où il la retrouva. À l’exception d’un mouvement de curiosité qui l’avait amené chez Charles Musgrove, il n’éprouvait aucun désir de la revoir. Son attachement pour elle