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cœur de Wentworth ? n’est-ce pas naturel ? n’est-ce pas certain ? Cet intervalle, qui composait un tiers de sa vie, n’a-t-il pas tout changé dans son existence morale et physique ? est-elle encore la jeune et fraîche Alice sous la douce influence d’un premier sentiment, qui répandait sur elle, sur lui, surtout ce qui les entourait un charme magique ? La pesante et dure main du temps n’a-t-elle pas effacé pour jamais ces impressions de jeunesse et d’amour ?

Hélas ! après tous ces beaux raisonnemens, Alice sentait encore au fond de son cœur que huit années passent bien rapidement ; mais lui, ce Frederich si tendre, si passionné, qu’éprouve-t-il ? pourquoi cherche-t-il à éviter Alice ? pourquoi ne lui parle-t-il pas comme à Maria, comme aux Musgrove ? Elle est donc différente à ses yeux ? Cette idée la ranime un moment ; mais l’instant d’après elle se blâme elle-même de s’être fait une telle question : cependant son espoir se ranime encore ; mais sa douce illusion lui est bientôt ravie.

Maria, Henriette et Louisa revinrent de leur promenade ; elles avaient entendu les chiens, et même entrevu les chasseurs. Le capitaine était venu leur parler un instant.