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loin de pouvoir exciter aucun regret chez Alice de l’avoir cédé à sa sœur cadette, et de lui faire oublier le capitaine Wentworth. Cependant elle croyait, ainsi que lady Russel, qu’une union avec une femme plus sensée et moins enfant gâté que la sienne, aurait donné plus de consistance à son caractère, plus d’activité à sa vie, plus d’élégance à ses habitudes, plus d’instruction à son esprit, par conséquent un entretien plus agréable, et une existence plus utile : rien chez lui ne s’était développé ; il était resté ce qu’il était au sortir de l’enfance ; sans passions vives, ne faisant ni mal ni bien, ne mettant à rien ni zèle ni chaleur, excepté à la chasse, dépensant son temps en niaiseries, sans lire, sans penser, et vivant au jour la journée. Il avait, ainsi que ses sœurs, un fond de gaîté et d’insouciance qui l’empêchait d’être affecté des lamentations continuelles de sa femme ; il supportait sa déraison et son ennui avec une patience qu’Alice admirait, quoiqu’elle eût quelquefois le désagrément d’un appel de tous deux à son avis dans leurs petits différends, et de déplaire à sa sœur si elle n’était pas du sien : mais en tout ils pouvaient passer pour un heureux couple ; le mari et la femme étaient au moins toujours d’accord sur