Page:Aurel - Le nouvel art d'aimer, 1941.djvu/60

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
54
LE NOUVEL ART D’AIMER

fille un peu terne et de peu de figure, pour embraser ainsi ce garçon qui ne la quitte pas des yeux ?

Approchons-nous. Et nous ne tardons pas à voir qu’elle ne parle de rien d’extérieur, ni des faits survenus ni de la pitance ni de la matérielle, choses qui agacent les hommes et que je les en loue ! Elle note les progrès de l’amour, elle lui dit : « Comme tu m’as mieux parlé aujourd’hui qu’auparavant. J’ai repensé à ce que tu m’avais proposé et je trouve qu’en cette voie on peut faire encore mieux. » Elle le fête, l’augmente, elle l’honore pour que chaque mot d’elle aide l’homme à monter, à avancer. Elle s’y ingénie. Celle-là sait aimer.

Au lieu de vilipender les couples que tu vois venir, interroge, écoute surtout celle ou celui des deux qui tient rivé sur ses yeux le regard de l’autre.


Mais fonde-toi sur la bonté
qui est un sage et dont on a toujours besoin plus que sur la passion, cette jument qui piaffe intempestive à tort et à travers. La passion oublie l’autre au fond de son propre bouillonnement. La bonté seule enchaîne et pense l’autre. Elle l’enveloppe d’un réseau d’attentions, de soins. La bonté seule aime juste et sans trous. Elle est la seule passion, elle qui pense, qui ne nous reconduise pas au singe. Donc mets de la bonté partout.’Sans elle pas d’amour.

On n’est pas bon sans un esprit ouvert c’est-à-dire ouvert aux autres. La bonté c’est lumière et magnanimité, signe de race. Elle n’entre pas dans l’esprit obtus qui est assez mesquin pour tenir tout entier dans son sac de cuir.

Celui-là se ferme l’univers des autres, qui le renou-