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PARENTS
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Il paraît seulement qu’on pourrait rendre propre le nourrisson plus tôt avec un peu d’observation. On le rend moins criard en le laissant crier. On peut créer encore dans cette voie puisque j’ai vu éduquer des petits chiens à ne rien salir. Le médecin peut-être, la sage-femme surtout y aideront. On obstrue le destin des mères en leur faisant laver dix couches par jour. Le corps est élastique : on en fait ce qu’on veut pourvu qu’on l’étudie.

Nous qui ne pouvons deviner les natures en leur petit âge, attendons-les, respectons-les. Que pas un geste des parents ne vienne étonner leur candeur : nous ne savons pas quand s’éveille la mémoire des images. Si nous ne pouvons réveiller nos poupons en musique ainsi que fit le père de Montaigne, entourons-les s’il se peut, de beaux visages dictateurs d’harmonie.

J’ai vu des gens fins se tromper lourdement en ne distinguant pas l’individualité des gens de deux à cinq ans. Elle est marquée plus tôt.

Un ménage avait deux petites filles de trois et cinq ans, Jeanne et Louison. Leurs adorables corps nus dans la salle de bains sortis du tub, Jeanne — cinq ans — ignorant splendidement la pudeur appuya son derrière sur la vitre de la rue pour ramasser je ne sais quoi : les petits sont si occupés ! — « C’est honteux, hurla la nurse imbécile, ne réussissant pas, heureusement, à donner à cet amour le sentiment de la honte. Quant à Louison — trois ans — son père s’étant arrêté sur la porte à la regarder, elle se mit à jeter des cris perçants, tournant le dos et se voilant l’honneur avec ses mains de chérubine. Son père la moqua et fut là, quoique très sensible, un barbare.